Wednesday, April 13, 2016

Comment le dingo s’est rendu en Australie

Science
Column|Jérémie Gaudet

Deux jeunes dingos au zoo de Perth (Australie)

Reconnaissable à ses oreilles dressées et à son pelage roux doré, le dingo ne serait apparu en Australie qu’il y a quelque 4000 ans, selon ce que suggèrent les preuves archéologiques. Mais comment ce chien sauvage emblématique s’est-il retrouvé dans cette région, et grâce à qui ?

Plusieurs groupes de personnes auraient pu avoir amené le dingo en Australie. Des marins indiens voyageant en Australie, les Lapita marins qui se propageaient vers l'est dans le Pacifique de l'Asie orientale et les commerçants de Timor et du Taïwan qui ont navigué à travers l'Asie du Sud-Est étaient jusqu’à ce jour des candidats potentiels.

Était également sur la liste un groupe de chasseurs-cueilleurs maritimes, appelés Toaliens, provenant des péninsules du sud de l'île indonésienne de Célèbes. Toutefois, aucune certitude n’était reconnue jusqu’à ce jour sur le sujet.

Pourtant, Paul Taçon et Mélanie Fillios, des chercheurs respectivement affiliés aux universités Griffith et de la Nouvelle-Angleterre, toutes deux situées sur la côte est australienne, ont tenté d’y voir plus clair dans cet ensemble de possibilités.

Ces derniers suggèrent, dans le cadre de leur plus récente étude, publiée dans le Journal of Archaeological Science : Reports, que le dingo serait en fait originaire de l’Indonésie, conduit en Australie par les Toaliens.

Pour en arriver à cette conclusion, les chercheurs ont mené un examen de plusieurs recherches génétiques portant sur les chiens, les dingos et d’autres canidés provenant de sept articles récents. Ils y ont trouvé des racines communes qui leur ont permis d’éliminer un à un les groupes qui auraient pu avoir fait migrer les dingos vers l’ile australienne.

Ils ont d’abord exclu les marins indiens en observant la base de l'ADN des loups, des chiens et des dingos, qui semblait indiquer que ces animaux provenaient d'Asie (et, plus probablement, de la Chine), avant de s’être propagés au Taiwan et en Asie du Sud.

Puis, ils ont analysé un rapport datant de 2014, lequel a révélé que les dingos ne possèdent pas de multiples copies d'un gène permettant la digestion de l’amidon. Or, les cousins ​​des dingos ont, eux, développé ces gènes en évoluant auprès d’agriculteurs. Cela suggérait donc que, avant leur arrivée en Australie, ils ne vivaient pas avec des gens du milieu agricole, tels les marins de l'Inde, ou les commerçants taïwanais ou timorais.

Restaient donc les Lapita ou les chasseurs-cueilleurs toaliens comme principaux prétendants. Par contre, les chercheurs ont observé qu’il n'y a aucune preuve de la poterie des Lapita en Australie, et encore moins des porcs et des poulets que ces peuples apportaient avec eux partout où ils allaient. De plus, ils ont aussi compris que le peuple Lapita a quitté l’Asie il y a 3300 ans, bien après que les dingos soient arrivés en Océanie.

Cela laissait donc le peuple des Toaliens. Taçon et Fillios croient que seule cette population puisse véritablement avoir emmené les dingos en Australie de l’ile indonésienne de Bornéo, située au nord. Cette hypothèse serait appuyée par plusieurs données archéologiques, notamment des similitudes dans l’art rupestre, les outils et les matériaux de construction découverts en Australie qui auraient pu provenir de ce peuple.

Les résultats de l’étude seront confirmés sous peu après la complétion d’analyses supplémentaires d’ADN contenu dans des restes archéologiques de dingos.

Tuesday, April 5, 2016

Mars en science

Science
Column|Jérémie Gaudet

Découvertes récentes, nouvelles curiosités, faits divers scientifiques : faisons le point sur quelques actualités liées à la science qui comptent parmi les plus importantes du dernier mois.

Monter les escaliers… pour rajeunir son cerveau !

Il était déjà connu qu’une année d’éducation supplémentaire peut réduire l’âge du cerveau d’un an, mais qui aurait cru que monter des marches puisse avoir un effet similaire ?

Et pourtant, c’est bien le cas de le dire : selon une étude montréalaise parue récemment dans la revue Neurobiology of Aging, ceux et celles qui montent environ vingt marches par jour auraient un cerveau sept fois plus jeunes que les adeptes de l’ascenseur.

Les auteurs, des chercheurs de l’Université Concordia, ont effectué quelque 80 mesures sur plus de 300 participants recrutés dans la ville de New York. Conclusion : une volée d’escaliers (quinze à vingt marches par jour) diminuerait l’âge physiologique du cerveau de 58% d’une année, soit l’équivalent de sept mois.

Scott Kelly de retour sur Terre

L’américain Scott Kelly est rentré sur Terre le 1er mars dernier après un séjour de presque un an (340 jours) dans l’espace coordonné par l’agence spatiale américaine (NASA), effectué en compagnie du cosmonaute russe Mikhaïl Kornienko.

Cette douzaine de mois passée à bord de la station spatiale internationale (SSI) avait pour but d’étudier les divers effets que peuvent avoir sur l’humain des séjours prolongés en apesanteur.

Cette expérience s’avérera particulièrement importante dans le contexte de préparation des missions habitées vers Mars, qui devraient se situer dans une quinzaine d’années.

Scott Kelly fournira donc à la NASA des échantillons de fluides corporels lors des prochaines années, données qui devront être comparées à celles de son frère jumeau, Mark Kelly, qui, lui, est demeuré au sol.

Lors de son retour sur Terre, l’astronaute, qui s’est plaint de courbatures, a affirmé que de se réadapter à l’attraction gravitationnelle terrestre lui causerait plus de difficulté que de s’adapter à l’apesanteur dans la SSI.

Par ailleurs, le spationaute de 52 ans a annoncé environ une semaine après son retour sur Terre qu’il prendrait sa retraite le 1er avril prochain, après une carrière de vingt ans à la NASA.

Alzheimer : vers une nouvelle piste

Jusqu’à ce jour, la cause exacte de l’Alzheimer, cette maladie incurable entrainant une perte progressive de certaines fonctions mentales, dont la mémoire, qui touche quelque 30 millions de personnes dans le monde selon l’OMS, demeure inconnue.

Pourtant, deux hypothèses quant à celle-ci sont souvent évoquées par les chercheurs : soit la maladie résulterait de la dégradation de cellules spécifiques qui endommageraient la mémoire de manière permanente, soit l’accès aux souvenirs, toujours stockés en mémoire par le cerveau, serait bloqué.

C’est dans l’optique de soutenir la seconde possibilité que des scientifiques du Riken-MIT Center for Neural Circuit Genetics, affilié au Massachusetts Institute of Technology (MIT) et à l’institut japonais Riken, ont développé une méthode permettant à des souris atteintes de symptômes similaires à ceux provoqués par l’Alzheimer de recouvrer la mémoire en laboratoire.

Les chercheurs ont administré une faible décharge électrique via les pattes de souris encagées, certaines ayant les facultés de mémoire affectées. Ils ont répété l’opération 24 heures plus tard : les souris normales manifestaient une peur face à l’idée d’être électrocutées à nouveau, alors que celles atteintes d’Alzheimer ne réagissaient pas.

Toutefois, lorsque l’équipe a stimulé certains neurones liés à la mémoire des souris dites atteintes par le biais d’une lumière bleue intense, selon une technologie de réactivation appelée optogénétique, ces dernières étaient en mesure de recouvrir le souvenir de la douleur de la décharge électrique et éprouvaient une frayeur vis-à-vis de celle-ci.

Leur étude, publiée la semaine dernière dans la revue britannique Nature, conclut que cette technique, une fois perfectionnée et éthiquement conforme, pourrait s’avérer être une piste de solution chez les humains, dont la mémoire fonctionne de manière semblable à celle des souris, atteints de la maladie d’Alzheimer.

L’article de l’étude en question : Memories retrieved in mutant ‘Alzheimer’s’ mice